Elle crie, elle vit, elle apostrophe son public … c’est un pantin féminin qui a coupé ses fils et qui n’est plus mû que par elle-même ! Et pendant ce temps là, je suis scotchée à mon écran.
Pendant 1h30, Bette Midler s’époumone sur scène, brûle sa vie, ne fait aucun compromis ni à la passion ni aux excès … Elle picole, elle a la cuisse légère, elle s’enfarine le nez, elle se bousille, et le résultat sur scène est un feu d’artifice permanent.
J’ai 15 ans, et dès aujourd’hui, je deviendrais une fan de rockeuses, bien que le seul vice qui me soit connu soit le Coca Light !
Le film en question est
the Rose, inspiré de la vie de Janis Joplin, qui n’a vécu que pour son motto « You can destrow your now by worrying about your tomorrow », vous épargnant ainsi d’entendre une enième fois le Sex Drugs and Rock’n roll.
Janis, c’est un peu une amie imaginaire qui aurait vécu avec moi mes up and down en me chantant Little girl Blue, ou Kozmic Blues. Je ne peux d’ailleurs plus écouter certains de ces morceaux parce qu'ils enclenchent irrémédiablement un appel au kleenex. J’ai prié avec elle le seigneur de m’acheter une Mercedes Benz (mais ké’c qu’il faut pas raconter pour un post !) , même si elle possédait plutôt une Porsche psychédélique en diable, j’ai fais vibrer les décibels sur
Bobby Mc Gee ou
Down on me, parmi tant d’autres perles de culture janisienne.
Bref, Janis is Janis, et elle aura réussi en un passage éclair sur la scène musicale à inscrire son prénom dans les mémoires collectives.
Comment le monde a-t-il hérité de la légende Janis Joplin ?
Once upon a time in the South, en plein Ploucland texan (plus exactement Port Arthur) naissait une petite fille pas très jolie. Issue de la petite bourgeoisie locale, elle grandit au rythme de son hypersensibilité, qui la conduira de l’exécutoire artistique nommé peinture à celui de la chansonnette (tout comme Gainsbourg, qui était un peintre frustré).
Cette demoiselle détonne dans cette petite ville conservatrice avec son image de bad girl, à l’esprit contestataire (lutte pour les droits civiques des noirs…), la philosophie beatnik
(1) et la dégaine qui allait avec.
Dans un premier temps, Janis Lyn s’en va clopin clopant étudier à l’Université du Texas, à Austin, où elle aurait gagné le concours de « l’homme le plus laid de la fac », et se met à chanter dans les bars du coin. Ses influences musicales revendiquées sont plutôt du côté du Blues black, telles Billie Holliday ou Bessie Smith, cette dernière et elle-même ayant eu
des destinées pratiquement superposées.
Avant de décrocher son diplôme, elle quitte le Sud pour «
the streets of San Fransisco, gentle people with flowers in their hair », répondant ainsi aux sirènes de Scott Mac Kenzie (qui ne l’a chanté qu’en 67, soyons précis).
Elle y fait ses armes au sein du groupe psychédélique Big Brother and the Holding Company, qui vivote jusqu’à la participation coup de feu au Monterey Pop Festival, en Juin 67.
Et ce jour là, né le mythe Janis ! Devant un public stupéfié, elle met ses tripes sur scène sur fonds de
Ball and chain, au rythme de sa voix cassée par un régime Héroïne-Whisky (Southern Comfort). La chanteuse des Mamas and papas, Mama Cass Eliot, en reste bouche bée, et je dis ça pour rester polie !
Il faut noter que durant ce festival, préambule à Woodstock, de nombreux talents sont devenus des légendes du rock, comme Jimmy Hendrix, the Who ou Otis Redding.
L’année suivante, Janis et son groupe sortent
Cheap Thrills qui contient notamment la version la plus bluesy sur terre de
Summertime,
Piece of my heart,
Ball and chain…
Elle quitte son groupe et en créé un autre, the Kozmic Blues Band, avec lequel elle enregistre en 69 (année érotique)
I got’dem all Kozmic Blue again mama, qui est, comme son nom l’indique on ne peut plus bluesy :
Kozmic Blues,
One good man,
Little girl Blue, ou
Try. La Janis tristouille y fait des étincelles.
L’année suivante, en 70 et à seulement 27 ans, pendant qu’elle enregistre l’album
Pearl, à L.A, cette écorchée vive a la très mauvaise idée de faire un duel sous le soleil avec une surdose d’héroïne. Bien que s’étant entraînée pendant des années à la consommation intensive de drogues de toute sorte, ce jour-là, elle dégainera moins vite, et s’éteindra toute seule dans sa chambre de motel.
Son album héritage comprend
Bobby Mc Gee et l’une des dernières chansons qu’elle ait enregistrée est
Mercedes Benz.
L’aspect Drug and Rock’n roll est clos, mais n’oublions pas que la petite fille au physique ingrat aura tout de même été une sacrée coquine, attirant dans son lit hommes et femmes, sans aucune distinction des genres. A noter qu’elle a batifolé avec Leonard Cohen (
Chelsea hotel est dédiée à Janis) et Pickpen des Greatful dead, et qu’
elle a failli dévorer tout cru Jim Morisson et de nombreuses célébrités et inconnu(e)s au bataillon.
Une anecdote veut qu’après sa performance au Monterey Pop Festival, elle fût approchée par la Columbia Records, en la personne d’un record chief pour faire partie de leur écurie. Elle aurait rétorqué qu’elle ne signerait que si ce jeune homme acceptait de faire la bête a 2 dos en sa compagnie.
Epilogue : Comme vous l’aurez constaté à la lecture de tout ce qui a précédé, Janis n’aura guère eut que 3 ans de gloire de son vivant (67 à 70), et précisons aussi que tout le monde n’est pas fan de sa voix. Je me souviens d’un collègue étudiant qui m’a affirmé royalement que sa grand-mère pourrait faire mieux (
connard, m’étais-je dis entre les dents). Janis, on n’a pas le droit de ne pas aimer ! Je suis parfaitement anti-démocratique là-dessus, ou bikhir ! Une femme qui vous balance à la figure « It’s all feeling. When I’m singing, I’m not thinking », eh bien, mesdames et messieurs, on ne peut qu’agréer !
Un autre sacrifice humain aux dieux du Rock, vu qu’elle a plongé la tête la première dans le triangle des Bermudes du milieu qui veut qu’une star se doive de « débrancher le micro » avant ses 28 ans. A l’image du Wild Thing-Jimmy Hendrix (15 jours avant elle) et Jim Morrison qui a signé the End quelques mois plus tard, miss High on dopes n’a pas dérogé à la règle tacite.
I never found out why
I keep pushing so hard a dream,
I keep trying to make it right
Through another lonely day
Kozmic Blues
(1) Un beatnik n'est pas un hippie, la différence étant que les beatniks ont été les premiers à rejeter la société de consommation, avec un discours intello et libertaire, différent du « Peace an love » des hippies. Grosso modo.